GISCARD – MACRON les mal aimés

Giscard/Macron, les mal-aimés ?

V

érité en deçà, erreur au delà, paraphrasant Pascal sur l’air du temps qui passe, je ne puis m’empêcher de souligner un parallèle entre nos deux présidents quant au jugement que les Français portent sur ces deux hommes “mal aimés” et leurs actions.

1974 – Giscard Président

En 1974, Valery Giscard d’Estaing est élu Président à 48 ans. Jeune citoyenne, je n’adhère absolument pas aux engagements de cet homme. Il reste le symbole d’une certaine France que je rejette et jusqu’à la fin de son mandat je ne changerai pas d’opinion.

Président Valéry Giscard d’Estaing

Et Pourtant, la féministe que j’étais et que je demeure aurait dû être sensible à sa politique très en faveur des femmes. Bien sûr, j’applaudis aux avancées sociale telles l’IVG, la pilule, la majorité à 18 ans, le divorce par consentement mutuel, la création d’un secrétariat à la condition féminine, l’ouverture aux autres couleurs politiques, l’entrée des femmes au gouvernement dans des postes crédibles, mais jamais je n’en reconnaitrai la paternité à Giscard. L’IVG, ce sera Simone Veil, la condition féminine ce sera Françoise Giroud et ainsi de suite…

Françoise Giroud
Simone Veil

Du septennat, je préfèrerai retenir les affaires (les diamants de Bokassa, le “suicide” de Robert Boulin, l’assassinat de Jean de Broglie, les avions renifleurs, l’affaire Dassault…) et la liste est longue. Il faut dire que l’on meurt “bizarrement” sous la présidence Giscardienne.

Affaire des Avions Renifleurs

46 ans plus tard, il me faut l’admettre, ces deux premières années de Présidence furent parmi les plus réformatrices voire les plus innovantes quant aux moeurs et à la reconnaissance des femmes dans la société au cours de la 5ème République. Sans la seule volonté de Valéry Giscard d’Estaing rien ne se serait fait. Jacques Chirac, 1er ministre, nous démontrera au cours de ses deux mandats présidentiels son incapacité à faire évoluer la société.

Aussi, je m’interroge sur cette attitude au moment ou l’histoire se reproduit avec le Président Macron. Pourquoi cet aveuglement, ce refus de reconnaitre la qualité de l’action entreprise, au nom de son propre engagement politique ?

2017 – Macron Président

En 2017, Emmanuel Macron est élu Président à 39 ans.

Président Emmanuel Macron

Il engage les réformes nécessaires annoncées lors de la campagne présidentielle. En réponse il doit faire face à plusieurs manifestations particulièrement violentes (Sncf 2018, Retraites 2019, Gilets Jaunes 2019), une crise sanitaire sans précédent ponctuée de manifestations contre le confinement, contre les lois dites liberticides, émaillées de violences des Black blocs et de leurs sympathisants auxquelles répondront les forces de police.

Manifestation 2020

Pendant cette crise sanitaire, des mesures fortes et sans précédent sont adoptées par le gouvernement pour soutenir les salariés, les entreprises, l’économie. Aucun pays d’Europe ni du monde n’en fera autant. Sous l’impulsion d’Emmanuel Macron et d’ Angela Merckel, l’Europe acceptera de mutualiser la dette sauvant ainsi tous les pays d’Europe d’une débâcle financière et de faillites en chaine. Le chômage total ou partiel instauré en France maintiendra le niveau de revenus des salariés pendant les périodes de confinement.

La Chancelière Angela Merckel et le Président Macron

Et pourtant, moins de 50 % des Français plébiscitent l’action présidentielle. Bien sûr, rien n’est parfait, et certains auront souffert et souffriront encore plus que d’autres malgré les mesures prises. Mais je m’interroge ; quel femme ou homme politique français, toutes couleurs confondues, aurait fait mieux ? L’Europe unie a évité le désastre. Les souverainistes de tous poils, les anti-européens s’ils contestent les décisions, quelle aurait été leur réponse à une crise sanitaire sans précédent, sans l’aide de l’Europe ?

Essayons de comprendre ce refus d’accepter l’évidence que ces hommes là ont su agir et prendre de bonnes mesures ?

Giscard – Macron : La Leçon ?

Trop jeunes, trop de talents, trop de savoir, trop sûrs d’eux, trop arrogants, trop cash ; La France préfère parfois “Poulidor” à “Anquetil”, le second au premier de la classe.

Jacques Anquetil – Raymond Poulidor

Le désir de bien faire et de prendre les mesures parfois impopulaires qui s’imposent ne sont pas la meilleure caution pour être aimé. Au contraire, pour être aimé le populisme semble une meilleure voie : dire ce que chacun veut entendre et trouver un bouc émissaire pour expliquer les échecs d’une telle politique. L’histoire nationale et internationale regorge d’exemples passés ou actuels (Hitler, Péron, Franco et dans une autre mesure Salvini, Orban, Bolsonaro, Trump et d’autres encore…). Certains prétendants à la future présidentielle en France n’hésitent d’ailleurs pas à flirter outrageusement avec les même thèmes (Le Pen, Mélenchon, Dupont Aignant…).

Devront nous toujours choisir entre un dirigeant compétent impopulaire et un dirigeant populiste incompétent ?

Crédit Photos : RTL.fr, Lecoq AFP, Liberation.jpeg, France3 Régions, Elysées.jpeg, Revue des 2 mondes, Dirigeant.fr

6 Comments

  • BEN dit :

    Bravo Annie pour cet excellent article. J’ai voté Giscard mais pas Macron (vote blanc). Un financier n’est pas un politique et inversement. Depuis toujours, chaque President traîne ses casseroles. Les générations futures vont payer une dette abyssale. L’Europe à 7 ou 9, oui mais là non !!! Je suis contre le « gratuit » et même ces fichus tests auraient dû être facturés ne serait-ce que 2 euros pour une cagnotte pour les sans-abris par exemple.. La France plonge et ce n’est que le début. Donc en attendant le déluge très belles fêtes. Si, si je suis optimiste mais lucide.

  • Eliane dit :

    Je suis de très près tes divers “AVis d’Annie” et je dois avouer que bien souvent j’hadère entièrement, mais celui-ci me semble au-delssus du lot et je t’envie de savoir et pouvoir dire les choses afin d’eclairer Certains points qui souvent restent dans l’ombre. Félicitation pour ton esprit d’analyse.

  • Ника dit :

    Valery Giscard d’Estaing pensait que l’histoire etait injuste avec lui puisqu’il etait le moins populaire des presidents de la Ve Republique. Pourtant, son impact sur la modernisation de la societe francaise apres son election a ete reel. Rappelons que c’est lui qui fait passer le droit de vote a 18 ans alors que les jeunes sont censes voter a gauche, c’est sous sa presidence qu’est adoptee des 1974 la legalisation de l’avortement contre l’avis de sa propre majorite, puis le droit pour l’opposition de saisir le Conseil constitutionnel, une reelle avancee democratique. Quel est son bilan sur le plan international ? Il est president lorsque se deroule la Conference sur la securite et la cooperation en Europe (CSCE) a Helsinki en 1975, preparee avant son arrivee au pouvoir. C’est alors l’apogee de la Detente. Les « faucons » avaient denonce un marche de dupes dans lequel l’Union sovietique admettait le principe des libertes d’expression et de deplacement sans vouloir les respecter alors que les Occidentaux lachaient la proie de la reconnaissance des frontieres issues de la Seconde Guerre mondiale. En realite, personne ne voulait remettre en cause les frontieres, avec ou sans CSCE. C’est a partir de Helsinki qu’allaient se creer le Comite de defense des ouvriers en Pologne qui a debouche sur le syndicat Solidarnosc et la Charte 77 enTchecoslovaquie, avec le futur president Vaclav Havel. Pour le monolithisme sovietique, le ver etait dans le fruit. Giscard n’a peut-etre pas ete assez conscient que la Detente avait pris fin et que l’on entrait a partir de 1979 dans une nouvelle guerre froide, il n’a pas voulu soutenir la double decision de l’OTAN. C’est Francois Mitterrand, qui pourtant allait faire entrer des ministres communistes au gouvernement qui l’a soutenu, qui a accuse Giscard d’etre le « petit telegraphiste de Varsovie » parce que ce dernier avait rapporte au G7 l’annonce faite par Brejnev qu’il avait rencontre quelques semaines auparavant en Pologne d’un retrait des troupes sovietiques d’Afghanistan. L’annonce s’etait averee etre un message de propagande du dirigeant sovietique. C’est a l’initiative de Valery Giscard d’Estaing qu’a ete cree le G7, en voulant eviter que le repli sur soi des economies en difficulte apres la desindexation du dollar et de l’or et du quadruplement des prix petroliers, ne conduisent a une crise aussi grave que celle de 1929. Il pense alors que si les chefs d’Etat des nations les plus industrialisees se reunissent comme des amis dans une maison au coin d’un feu de bois, ils pourront trouver les solutions pour eviter cela. Le G7 est depuis devenu un fantastique barnum loin d’une simple reunion entre amis. Dans tous ces cas, Giscard comptait sans doute de facon excessive sur son pouvoir de seduction, sur l’ascendant qu’il pourrait prendre sur les autres. Il fut ecoute par Helmut Schmidt, par ses pairs du G7, mais se heurta a l’intransigeance de Brejnev. Il tenta egalement de lancer un dialogue euro-arabe avec un volet economique important du fait des nouvelles richesses des pays petroliers. Il sera considere comme hostile a Israel pour avoir ete a l’initiative de la declaration de Venise de 1980 qui reconnait a l’unanimite des Etats membres de la CEE le droit des Palestiniens a l’autonomie gouvernementale. Giscard a par ailleurs joue un role important dans la reconciliation franco-allemande : Adenauer et de Gaulle avaient forme le premier couple franco-allemand. Il va poursuivre avec Helmut Schmidt. Bien que celui-ci ne soit pas de son bord politique, ils vont ensemble lancer le systeme monetaire europeen, prologue de l’euro, et accelerer la construction europeenne a une epoque ou les societes allemande et francaise etaient encore eloignees. C’est bien la construction europeenne qui fut la boussole de Giscard. Il parvint a faire adopter l’election du Parlement europeen au suffrage universel direct, a partir de 1979. Depuis son lit d’hopital apres un accident de la route, Jacques Chirac enoncait en decembre 1978 l’accusation de « parti de l’etranger » en designant l’UDF, la formation politique creee par Giscard. Accusation grave s’il en est. Il se dira par la suite que Pierre Juillet et Marie-France Garaud, principaux conseillers de Chirac, avaient profite de son hospitalisation pour lui forcer la main. Valery Giscard d’Estaing poursuivra son engagement europeen apres avoir quitte l’Elysee. Il subira un autre echec douloureux avec le « non » au referendum de 2005 sur le traite constitutionnel europeen. Malgre tout cela, il n’a pas laisse dans l’histoire la trace d’un De Gaulle ou d’un Mitterrand. Il n’a pas eu l’occasion d’un coup d’eclat comme Chirac avec le « non » a la guerre d’Irak. Il fut elu au moment ou l’on ne savait pas encore que les 30 glorieuses allaient prendre fin et plonger la France dans la crise et l’apparition d’un chomage de masse.

    • annie dit :

      Merci pour ce commentaire qui donne une grande place au volet international de la politique de V Giscard d’Estaing, souvent oubliée dans les commentaires.

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